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LETTRE À CHARLEY MAROUANI, JACQUES BREL ET BARBARA

Lettre extraite du livre de Serge Reggiani "Dernier courrier avant la nuit"
Très cher Charley,
 
 
Vous, Charley, n'êtes pas de ces agents vampires, qui dévorent leurs enfants. Vous appartenez à l'histoire de la chanson françsise. Qu'il me suffise de citer vos célèbres " "poulains" ", Jacques Brel et Barbara, dont vous avez été le second père, l'ange gardien.
 
 
Jacques Brel. Le grand Jacques fut-il le plus grand chanteur de notre époque? Depuis sa mort, la chanson française est veuve. Devant lui, nous sommes tous muets. D'admiration et de reconnaissance.
 
 
Je me souviendrai toute ma vie d'un soir fameux où le public, incapable de quitter l'Olympia après deux heures d'émotion, rappela et rappela sans cesse Jacques Brel. Il revint saluer devant le rideau baissé... en robe de chambre. C'était émouvant; d'ailleurs, je pleurais au milieu du public, comme tant de spectateurs autour de moi.
 
 
L'un des secrets de Brel pour rester humble parmi nous, c'était l'humour. Un soir, je lui rendis visite dans sa loge quelques minutes avant le lever du rideau. Je voulais lui demander quelques lignes de sa main, un petit texte à glisser en guise d'introduction dans mon tout dernier album, prêt à sortir. Il acquiesça d'un sourire et m'écrivit immédiatement ce texte, d'une seule traite, sans une seule rature :
 
 
   Mais oui, la tendresse se trouve encore des chevaliers!
   Mais oui, l'amour s'offre encore l'âme d'un violon.
   Mais oui, mes frères se découvrent encore un merveilleux frère et se découvrent devant lui, comme moi.
   Je vous laisse avec Serge Reggiani boire votre chance.
   Et découvrir ou retrouver un gris tellement gris, que, tout à l'heure, vous découvrirez qu'il est bleu.
 
 
Brel était ainsi, poète dès qu'une plume touchait ses doights.
 
 
Ce n'est pas le hasard, très cher Charley, si j'évoque Barbara. Elle n'était pas seulement une immense artiste. Ma carrière de chanteur lui doit également beaucoup. Un soir, je me rendis au cabaret "La tête de Large" où chantait Barbara. Nous la connaisons pas encore, personnellement, mais je suis allé lui parler dans sa loge. Je voulais lui parler "chanson". Là, elle m'offrit de faire sa première partie de sa tournée. J'étais conquis. La tournée dura vingt jours, à la suite de quoi, je décidais de me produire en récital.
 
 
Très cher Charley, j'espère que mon dernier disque vous a plu, et que nous pourrons bientôt retrouner ensemble, moi dans la lumière et vous dans la coulisse, à la rencontre du public. À bientôt donc, Serge.

Contribution

Bernard Lebeau, version 1.0

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Version : 1.0
Dernière modification : 2023-01-04
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